Xavier Delpech – Docteur en droit – Juris Associations – Partenaire Associathèque

Deux arrêts récents de la Cour de cassation viennent apporter un éclairage intéressant sur des aspects assez méconnus de la liberté d’association.

Dans le premier arrêt, la décision renforce la liberté d’association dite « négative ».

Le principe de la liberté d’association présente un double visage. D’abord, et c’est le plus connu, celui de la liberté d’association « positive ». C’est la liberté d’adhérer à une association. Ensuite, la liberté d’association « négative » est synonyme de droit de ne pas (ou de ne plus) adhérer à une association. Cette liberté « négative » a été consacrée il y a plusieurs d’années déjà par la jurisprudence, à propos de la clause d’un bail commercial faisant obligation au locataire d’un local situé dans l’enceinte d’un centre commercial d’adhérer à une association de commerçants et à maintenir son adhésion pendant la durée du bail. La Cour de cassation avait alors jugé qu’elle est entachée d’une nullité absolue, car contraire à cette liberté (Civ. 3ème, 12 juin 2003, n° 02-10.778). Dans un contexte tout à fait similaire, la Cour de cassation vient tout récemment renforcer cette liberté d’association « négative » en jugeant que la méconnaissance par l’association des commerçants d’un centre commercial de la liberté fondamentale du locataire de ne pas adhérer constitue une faute civile ouvrant droit à réparation sur le fondement de l’article 1240 (anc. art. 1382) du code civil (Civ 1re, 27 sept. 2017, n° 16-19.878).

Dans le second arrêt, il est question de la constitution avérée ou non de l’infraction pénale d’entrave à la liberté d’association.

Il existe, en effet, une infraction pénale d’entrave à la liberté d’association, prévue à l’article 431-1, alinéa 1er du code pénal, punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende. La Cour de cassation considère, fort logiquement, qu’elle est d’interprétation restrictive. Dans l’affaire jugée, selon une association, qui a porté plainte sur ce fondement contre ses dirigeants, l’infraction serait ici caractérisée par les agissements suivants : changement des serrures d’un local de l’association et pose d’un imposant cadenas sur le portail d’un camp également occupé par l’association. Or, cette infraction suppose, parmi ses éléments constitutifs, l’existence d’une menace. Celle-ci est ici considérée comme insuffisamment établie. Pour la Cour de cassation, en effet, la menace prévue par l’article précité s’analyse en une violence physique, ou au moins en un acte d’intimidation, inspirant la crainte d’un mal. Les faits matériels dénoncés par la partie civile sont insuffisants pour être susceptibles d’être identifiés à de telles menaces (Crim. 28 juin 2017, n° 16-84.423).